[Dearth : Espace] C'est pas le moment de ramer ! [Terminé]

Samedi matin. Un professeur aux cheveux poivre et sel s’aventure lentement jusque dans la salle informatique. Sa fille, Mélodia, était encore en train de dormir dans sa chambre. Il aimait ses moments pendant lesquels, se préparant pour la journée, il pouvait en même temps observer le sommeil de sa petite. Comme si… Comme si rien n’avait changé. Même si tout cela ne restait qu’une illusion. Ainsi donc, le psychiatre se rendit avec son Mentali jusqu’à la salle informatique. L’objectif ? Commencer un profilage des élèves de sa classe. La méthode d’enseignement de Drew était avant tout basée sur du cas par cas. Le seul moyen d’arriver à jauger chaque cas était donc de commencer un profilage. Drew entama donc son travail en ouvrant un fichier texte dans lequel il répertoria les noms de tous ses élèves. Seconde étape, se connecter au service interne des dossiers des élèves réservé aux professeurs et y récupérer les données : âge, sexe, ville d’origine, boursiers ou non, ancien établissement et notes répertoriées. Tout était bon à prendre. De part ces informations de base, le veuf pouvait déjà se constituer une première base de données. Il prit une première pause pour se préparer un chocolat chaud à la machine à café du hall d’entrée, laissant Seriha veiller sur l’ordinateur pour qu’aucun élève indiscret ne jette un coup d’œil à ces données qui restaient confidentielles. Les boissons et autres nourritures étant interdites dans la salle informatique, il prit le temps de savourer son chocolat dehors dans la fraicheur du petit matin, là où les douceurs offraient un plaisir bien plus plaisant. Une fois son gobelet terminé, il était temps de retourner bosser.

De retour sur sa chaise, la salle informatique avait commencée à se remplir un peu, heureusement que Seriha réservait sa place. Maintenant que les données « officielles » de chaque élève avaient étés répertoriées, il fallait désormais recourir aux données « non officielles ». Drew allait donc commencer une recherche internet basée sur les noms de ses élèves pour voir ce qu’il pourrait apprendre. Loisirs, récompenses, coupures de presse, encore une fois tout était bon à prendre tant que cela pouvait permettre à Drew de créer des portraits précis et judicieux. La recherche lui prit plusieurs heures à cause de sa manie de vouloir rester le plus précis possible, de vérifier les sources et de toujours vouloir en trouver un peu plus. Afin de reposer ses yeux fatigués, le vieil homme recula sa chaise et caressa son Pokémon pour se détendre. De sa mallette qu’il avait toujours avec lui, il sortit un cristal créé à partir d’un de ses élèves. Il l’observa pendant quelques instants, suspicieux. Il ne cherchait pas à l’analyser, simplement à observer son éclat, la finesse de ses contours et de ses traits, la lumière qui passait à travers le cristal et se dispersait quelque peu autour de lui, tout en restant suffisamment discrète pour ne pas attirer l’attention.

Puis soudain, à l’intérieur de l’artefact, ne se refléta plus le visage de l’élève visé mais une forme géométrique de couleur blanche et bleue. Surpris par cette apparition inattendue, le quinquagénaire recula brusquement sa chaise, allant jusqu’à casse le pied arrière gauche, le faisant tomber lui et son Pokemon. Son cristal tomba et roula au sol tandis que les élèves présents observèrent la scène avec une surprise mêlée d’inquiétude. Ce qui semblait être un Pokemon extrêmement étrange lévitait actuellement devant l’écran d’ordinateur, observant Drew et le cristal de ses yeux inexpressifs. Par instinct, Seriha lui sauta dessus et se cogna contre le mur, montrant avec surprise que ce Pokemon étrangement cubique et à l’apparence lente, était doué de reflexes étonnants. L’un des élèves finit par le nommer une fois qu’il l’eut reconnu.

« Un Porygon ! C’est un Porygon ! »

Un Porygon ? On ne pouvait pas trouver un meilleur nom pour une chose aussi étrange qui semblait avoir le don de fusionner avec les ordinateurs ? Alors que Drew allait se relever pour s’écarter, le Porygon chromatique fonça sur le cristal et le récupéra à coup de lévitation. Non. Il était hors de question que ce bizarroide Pokemonial s’en aille avec un de ses artefacts. Par pur instinct de protection de ses affaires, le psychiatre sauta à son tour sur le Pokemon, constatant avec amertume que si son Mentali n’avait pas été assez rapide pour le chopper, cela ne risquerait pas non plus d’être son cas. Il ne fallut pas longtemps à la créature pour décider qu’il était temps de prendre congé avec son cristal entre les polygones. Drew se releva de nouveau et sortit avec empressement son Pokédex. Il fallait vite obtenir des informations sur ce devoir de géométrie doctoral.

« Porygon : Pokemon Virtuel. Ce Pokémon créé par des scientifiques peut arpenter librement le cyberespace. »

*Le Cyberespace ? Ca veut dire qu’il peut voyager à travers tout le réseau internet mondial. Il faut que je lui coupe la voie.*

Comprenant qu’il ne servirait à rien de rester les yeux fixés sur cet ordinateur, le professeur s’empressa de sortir de la salle informatique pour atteindre le cabinet dans lequel était stocké le serveur de l’académie ainsi que les modems de connexion à internet. Le seul moyen de retrouver ce Pokemon et de récupérer son bien était de lui couper toute retraite. Le professeur identifia rapidement les câbles du réseau internet et pria son Pokemon de les couper avec une attaque morsure. Est-ce que cela avait marché ? Le psychiatre et son acolyte avaient-ils réussis à le stopper avant qu’il ne s’échappe ? Difficile à dire. Après tout, il pouvait tout aussi bien rester caché sur le réseau intranet en attendant que l’on répare la liaison. Drew avait paré au plus pressé et ne savait pas quoi faire de plus pour le moment. Alors qu’il s’apprêtait à se poser quelques instants pour réfléchir, il n’en eut pas le temps. Un cri de femme déchira le couloir, lui faisant comprendre que tout n’était pas perdu. Sans perdre une seconde de plus, il se rendit dans le bureau d’où le cri provenait, pour n’apercevoir qu’une femme choqué de ce qui était sortit de son PC quelques instants plus tôt. C’était déjà trop tard. Mais il était là, et bien là. Maintenant il fallait parvenir à le piéger. Drew s’installa sur une chaise et prit le temps de réfléchir quelques instants.

*C’est un Pokemon virtuel capable de voyager à travers le cyberespace. Je viens de lui bloquer sa porte de sortie et maintenant il voyage à travers le réseau interne de l’université pour trouver une autre sortie. Le seul moyen de le stopper serait de le bloquer dans un ordinateur mais je n’ai aucune notion de codage ou de programmation.*

Soudain, quelque chose tilta. Le garçon de tout à l’heure, il avait put identifier du premier coup d’œil qu’il s’agissait d’un Porygon et cela malgré sa nature de chromatique. Ce garçon en savait plus que les autres. Avec un peu de chance (et de la feignasserie provenant de celui qui écrit ce post), cet élève saurait comment le stopper. L’homme aux années révolues se releva et retourna dans la salle informatique pour trouver cet étudiant.

« Toi, oui toi, tu as reconnu ce Pokemon, est-ce que tu as des notions d’informatique ? Il faut qu’on parvienne à le stopper. J’ai coupé internet sur toute l’université, il ne peut pas s’enfuir et il voyage dans tout le réseau interne, il faut qu’on sache comment le bloquer. Programme, pare-feu, tout ce que tu veux mais il faut qu’on le récupère indemne. Est-ce que tu as une idée ? »

Le jeune homme prit quelques instants de réflexion afin d’élaborer un plan viable. Il était déjà assez surpris de se trouver dans une pareille situation, il lui fallut donc le temps de mettre son esprit en paix.

« Le plus rapide est d’utiliser ce qu’il y a déjà d’actif dans l’ordinateur, un anti-virus. »

« Mais s’il pouvait être reconnu comme un virus l’ordinateur l’aurait déjà fait, ce truc là se balade comme si de rien n’était. Et un antivirus va tenter de le supprimer. »

« Pas si on lui demande de le mettre en quarantaine, il supprimera toute son activité et le placera dans un fichier à part dans l’ordinateur. Quant à la détection, si je regarde les registres d’entrée de la connexion de votre ordinateur, je disposerai de sa signature et je l’ajouterai à l’anti-virus ! »

C’était… Pas con. Il fallait donc s’y mettre immédiatement. Drew plaça le jeune élève à sa place et le laissa travailler tranquillement. Il lui fallut une dizaine de minute pour parvenir à réaliser ses manip’.

« Et maintenant ? »

« Maintenant on attend qu’il repasse sur cet ordinateur. »

Bien. La patience. Une des qualités qui ne lui faisait pas défaut. Drew remercia le jeune homme et lui demanda poliment de s’écarter. Il resta alors debout sans broncher à quelques mètres devant l’ordinateur, son Mentali à ses côtés.

« Seriha. Prescience. »

Le piège était prêt. Dès que l’anti-virus annoncerait la détection d’une intrusion, il piègerait le Pokemon en le mettant en quarantaine. Celui-ci n’aurait alors pas d’autre choix que de sortir de l’ordinateur pour se libérer. Ce n’était plus qu’une question de temps. Les yeux fermés et les bras croisés, le psychiatre attendit calmement, profitant de cet instant de silence qui précédait la tempête. Il aimait savourer ces instants. Ils étaient si rares et donc si délectables. Puis enfin se mit à retentir une alarme.

« Attention, il y a un virus sur votre ordinateur. Mise en quarantaine activée. »

La silhouette blanche et bleue ressortit de nouveau de l’écran, mais le cristal n’était plus avec lui. Ce postulat mis le professeur de travers, le faisant passer d’une expression sombre et calme à un rictus de colère retenue des plus inquiétant. Il voulait la jouer ainsi, on allait la jouer ainsi. La prescience du Mentali toucha le Porygon dès qu’il fut entièrement sortit du monde virtuel, le faisant tomber de manière très lourde au sol.

« Attaque Rafale Psy. »

Le Pokemon Psy s’exécuta immédiatement, tentant de rendre le Porygon confus afin de le désorienter tandis que Drew s’empressa de regarder dans la zone de quarantaine du PC. Un fichier s’y trouvait toujours, un fichier dont la date d’apparition correspondait à la détection du Porygon. Son cristal… C’était son cristal qui était là dedans. Ce Porygon l’avait virtualisé et le laissa sous cette forme avant de sortir de l’ordinateur. Drew n’avait donc pas d’autre choix que de le faire plier à sa volonté pour récupérer son bien. Touché par les deux attaques, le Pokémon cybernétique ne souhaitait pas continuer le combat plus longtemps. Sa tête se tourna vers l’un des autres ordinateurs en activité.

*Merde, il va encore s’échapper.

« Seriha, détruit le disjoncteur maintenant ! Météores ! »

Aussitôt ordonné, aussitôt exécuté. Le Mentali détruisit le boitier qui régulait la distribution de l’électricité aux prises du secteur, faisant s’éteindre automatiquement tout le matériel informatique. Il n’y avait plus d’échappatoire possible. Voyant que le Pokemon semblait être épuisé et peu enthousiasmé par un combat, il s’approcha de lui, le fixa de ses yeux remplis d’une ardeur malsaine et lui expliqua les choix qu’il lui restait.

« Je crois que tu n’as plus envie de souffrir que je n’ai envie de te faire souffrir. Soit tu coopères, tu me rends mon bien et j’accepte de partager ce secret avec toi, soit tu te rebelles et tu finiras tes jours dans une zone sauvage sans aucun moyen de retrouver ton univers virtuel. Le choix me parait simple. »

Le Porygon baissa la tête, conscient qu’il avait perdu. Mais tout ne semblait pas si noir. Drew lui offrait la possibilité s’il le voulait d’en apprendre plus sur cet item. De toute sa vie de Pokemon, jamais il n’avait vu une structure cristalline ayant ce type de propriétés. Lorsqu’il vit cet artefact pour la première fois, il eut beau faire une recherche sur tout l’internet, le monde entier n’avait aucune idée de l’existence de cette chose. Son désir de connaissance prit le dessus sur sa réflexion, le poussant à voler l’objet pour l’étudier. Malheureusement, il fut un piètre voleur. Voyant que cet humain semblait comprendre et accepter ses motivations, le Porygon préféra donc accepter ce marché qui restait de toute façon à sa défaveur. Lorsqu’il vit Drew sortir une Poke Ball de sa poche, il fut quelque peu triste. La Poke Ball restait pour lui un signe de soumission qu’il lui était compliqué d’accepter, mais le choix ne lui appartenait plus vraiment. Il appuya de lui-même sur le bouton de la Poke Ball afin de rentrer à l’intérieur. C’était désormais finit.

Le professeur récupéra l’objet qui trônait sur le sol de la salle informatique et le mit dans sa poche. Autant laisser ce Porygon se remettre de ses émotions. De toute façon, l’électricité ayant sauté, il ne lui était actuellement pas possible de récupérer le cristal dans l’ordinateur. Il ne restait donc plus qu’un seul défi à relever par Drew avant de pouvoir jouir lui aussi d’un repos bien mérité… Aller expliquer au proviseur pourquoi il avait bousillé la moitié de l’informatique de l’académie et comment il allait rembourser les dégâts. Ce sera surement le plus grand défi de toute sa carrière de professeur…

*Je suis trop vieux pour ce job.*