Jason: Tout a un début et une fin... [Terminé]

Vous voyez ce pokémon là, celui qui est allongé par terre et qui se vide de son sang? Et bien, c'est moi. A cet instant même, les dernières gouttes de vie ont coulé hors de cette piteuse enveloppe charnelle, mauve et tachée de noir et de rouge. Pourtant, à part cette sensation indescriptible dont certains quantifieraient de « froid », je ne ressens rien, du moins, plus maintenant.  

Plus de douleur...

Ni d’angoisse...

Ni de peur...

Dans ces quelques secondes qui me restaient, je n'avais pu que songer à ce que je venais de faire. J'avais réalisé que ma famille, mes amis, les êtres qui comptaient vraiment pour moi n'allaient plus pouvoir bénéficier de ma présence, ni même de mes maintes bêtises ou blagues... Ni ectoplasma, ni motisma... ni Kipix, ni Luna... ni Arian, Aredhel ou Alawn... ni Luke, ni ce ranger avec une petite caninos, Kirito et Asuka, je crois...

Personne, ni eux, ni moi...

Ce n'était pas un au revoir...

Mais un adieux, hélas.

Alors que ce sablier abîmé avait cessé d’écouler le sable de mon temps, les regrets, amères comme la bile qui m'avait remonté durant ces derniers mois, dû à la faim et à la fatigue, n'avaient pas pire goût que mon propre sang... La dernière chose que j'ai vu, c'était la pierre tombale avec le nom de mon maître puis une mare rouge suivie de lu noir total.

J'avais cessé d'être...

***Flashback***

Alors que j'avais l'impression d'avoir entrepris cette quête depuis une éternité, j'avais refusé de croire au fait que l'objet de mes convoitises soit toujours... Cela faisait plusieurs semaines que je vaguais par Sinnoh jusqu'à ce que j'ai enfin réalisé où pouvait se trouver mon maître. J'ai alors voulu rebrousser chemin, demandant aux passants -humains ou pokémons- s'ils avaient déjà rencontré -ou connaissaient de quelqu'un qui l'avait fait- mon ancien dresseur, leur décrivant tel qu'il demeurait dans mes souvenirs.

Puis, un jour, j'ai trouvé son ancienne maison en ville, sur l'île où je m'étais installé il y a à peu plus deux ou trois ans, je ne sais plus, j'ai appelé mon maître de toutes mes forces. J'avais gratté à la porte, j'avais crié pour voir si l'un de mes anciens compagnons sortaient et me reconnaissaient mais rien... Alors, j'ai attendu. J'ai vu les saisons défiler, depuis l'automne où j'ai repris mes recherches sérieusement, jusqu'à aujourd'hui... Encore l'automne... Cinq saisons s'étaient écoulées... cinq longs mois durant lesquels la seule chose qui alimentait mon corps était cette folle envie de revoir ce scientifique que j'avais vu le  jour où je suis venu au monde.

Une vieille femme, voisine d'en face, vint me revoir aujourd'hui, inquiète. Elle m'apporta de la nourriture, comme tous les jours, et voyant que je n'avais pas même lapé le lait d'écremeuh qu'elle m'avait apporté il y a quelques jours, elle s'accroupit et posa une main sur mon pelage :

_ Petit... tu dois manger. C'est difficile je sais, mais tu ne peux pas attendre plus. Cet homme ne reviendra pas. Il ne peut plus, désormais.  Me dit-elle, d'une voix tremblante et aussi usée par le temps que ses mains et son corps.

La septuagénaire m'expliqua alors que mon dresseur était mort il y a quelques années d'un cancer, inopérable. Personnellement, en fonction de ce qu'elle m'avait dit... j'avais placé sa mort à peine trois ans après qu'il m'ait oublié, enfin... abandonné dans les Colonnes Lances, au Mont Couronné... En sommes... j'avais un peu cherché et voyagé en vain...

Elle me dit qu'il avait été enterré en ville et que le cimetière se trouvait non loin d'ici alors, affaibli, je me suis déplacé. Tout allait relativement bien, mais, mon heure avait sonné... Arceus voulait que ce soit ainsi or, lorsque je traversais la rue pour aller au cimetière, une voiture m'a percuté et m'a roulé sur une patte arrière.  J'étais tellement près et tellement loin à la fois... je ne pouvais pas abandonner alors, je me suis traîné, boitant et tombant à moitié jusqu'à m'être effondré sur la première dalle en granite que j'ai trouvé... Je voyais flou, ma vie m'abandonnait au fur et à mesure que mes veines se vidaient... A part mon cerveau, aucune partie de mon corps ne répondait. J'étais complètement paralysé...

C'était la fin, pour moi.

***Fin du flashback***

Pourtant, j'avais senti au dernier moment une sensation de légèreté, de sérénité. A un moment même, j'ai cru sentir comme si quelqu'un me caressait la tête, tentait de me rassurer, de me consoler. Tout mon monde s'est effondré avec un simple sourire, en quelques minutes et une caresse. J'avais entendu une voix qui m'encourageait, pour m'être autant accroché à la vie, et qui me murmurait. Je me sentis partir, tout s'ébranla et s'illumina immaculément :

« Jason. Cela faisait longtemps, viens. Ne reste pas là! »

Il était là...

Malgré tout, même si ma vie avait été courte et que je regrettais de ne pas avoir dit à ma famille et à mes amis à quel point ils comptaient pour moi, me sentais bien. Je pouvais enfin dormir... me reposer auprès de mon dresseur.

Mercure-sama...